Ouvrir ce livre, c’est pousser la porte d’une vieille taverne ostendaise fleurant bon le goudron, la bière et la cannelle. Là, dans un coin, Jan van Dorp te fait signe et raconte… Quoi ? Une vie portée par le grand vent piquant de la mer. Non pas un pirate des Caraïbes, mais le Flamand de Brueghel, mangeur, buveur, sacrant braillard un brin paillard, qui concilie ses scrupules de chrétien avec ses goûts de flibustier.
Un classique absolu du roman maritime par l’un des meilleurs écrivains belges.
Ô toi qui me lis assis derrière ton bureau, attablé devant un café ou allongé sur ton lit… Plonge-toi un instant dans ces quelques pages écrites à l’eau de mer. Monte à bord du Flandre, largue le train-train quotidien, hisse la grand-voile chargée d’embruns et libère ton âme vagabonde ! Prends la barre, serre au près, scrute l’horizon, mate la houle… Un voyage extraordinaire t’attend.
Roman au réalisme saisissant, Flamand des Vagues ne fait pas dans la demi-mesure: d’une précision frôlant la maniaquerie, scènes de vie à terre et descriptions d’assauts en mer cachent une vraie poésie. Cette justesse se retrouve jusque dans les odeurs : iode salé, âcre relent de poudre, épices capiteuses… Jan Van Dorp glisse entre ces lignes tous les parfums du monde.
INCURSION PARMI LES CORSAIRES D’OSTENDE
Pourtant, le livre ressemble à un vieux gréement, une épave échouée attendant qu’on la réaffrète. Considéré comme un classique du genre, il connaît un succès planétaire lors de sa parution, en 1948. Or aujourd’hui qui, parmi la jeune génération, en a entendu parler ? Ce style un peu lourd de phrases aussi torsadées qu’un paquet d’écoutes emmêlées serait-il devenu trop compliqué pour nous ?
Affalés, mal cargués, les mots alignés pèsent… Toujours est-il que si tu les lis avec ton souffle – celui du cœur – ils se gonflent et claquent comme le génois sur son étai : “Éperonné, le Flandre plongea dans la lame au milieu d’un rejaillissement d’embruns et se releva en secouant une crinière d’écume. Tout le bateau avait gémi jusqu’aux tréfonds de sa membrure.” C’est dense, emphatique même… Mais tellement beau !
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Ces tirades accrochent l’imagination au point d’éprouver un mélange perturbant d’adrénaline, de peur, de sueur, de doutes… Tout ce que ressent Marinus dans ses premiers combats, ses deuils, ses conquêtes et ses rencontres.
Lève donc l’ancre en sa compagnie ! Oublie la terre ferme, ton boulot, tes ennuis. Ouvre ce livre et va-t’en, le visage balayé par la pluie, danser sur les vagues grises de la mer du Nord.
Lance la chasse ! Te voilà corsaire d’Ostende, cœur noble de marin dans un corps de pirate.

RÉSUMÉ
Évocation romanesque – mais d’un réalisme à la flamande, à quoi aucun détail assassin n’échappe – de la vie haute en couleurs des corsaires d’Ostende de la grande époque (la fin du XVIIe siècle) : celle où les marins de Flandre, rivaux de leurs cousins bataves, avaient réussi à se tailler un début d’empire dans les Indes. On se lance à l’abordage, on essuie de méchantes tempêtes, on vide force brocs de bière blonde et de vin clairet dans les tavernes du quai et rentré chez soi on astique les boiseries et les cuivres de son petit intérieur de marin bourlingueur avec le même soin qu’y mettrait une béguine de Bruges. Paradoxal génie de la Flandre qui n’a toujours pas fini de nous faire rêver.
Le chef-d’œuvre d’un des plus grands écrivains belges d’expression française de l’après-guerre – et l’un des plus sûrs classiques de l’aventure marine.
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